Evaluation de l’efficacité de la pratique de l’hypnose

 

Commentaire :

Dr Jean Marc Benhaiem, directeur du D.U Hypnose médicale de Paris VI- Pitié Salpêtrière.

Etudier et pratiquer l’hypnose est un vrai défi posé à un esprit scientifique.

 

Il faut saluer, dans ce rapport INSERM[1] rédigé à l’intention de la Direction Générale de la Santé, le sérieux de l’entreprise mais aussi la difficulté pour les auteurs de décrypter les études cliniques tant dans leurs protocoles que dans leurs conclusions.

Evaluer un médicament n’est déjà pas chose aisée, alors évaluer une procédure qui dépend du thérapeute, de ses connaissances, de la singularité du patient, de leur relation, de leur humeur du moment, de leur disponibilité et de leurs croyances respectives est une vraie gageure. L’hypnose avec sa composante suggestion est souvent assimilée à l’effet placebo ou à un effet placebo décuplé. Certains auteurs ont mis en évidence que l’hypnose aussi aurait un effet placebo. Les études cliniques finissent par comparer un placebo à un autre placebo ! Les difficultés sont contournées en comparant hypnose versus médicament ou versus liste de conseils. L’efficacité de l’hypnose est alors prouvée mais pas réellement expliquée.

Malgré tous ces obstacles et critères, il a été possible dans cette étude de tirer des conclusions fort utiles pour les soignants qui voudraient diversifier leurs possibilités thérapeutiques.

 

L’hypnose est un processus naturel tendu entre deux pôles. Ces deux pôles sont des attitudes ou des comportements opposés. A une extrémité la personne a la volonté et l’intention de maitriser toute chose, à l’autre pôle, elle est présente corporellement et se réfère à ses sensations et plus du tout à son mental. L’équilibre est trouvé lorsque la personne circule facilement d’un mode à l’autre. Ces deux modes sont des expériences communes qui font partie de notre physiologie normale. L’hypnose sert essentiellement à quitter le mode « contrôle » pour rejoindre son opposé qui se caractérise par une souplesse d’adaptation à l’environnement. Les pathologies se développent lorsque la personne ne parvient plus à changer de mode et donc à s’adapter à la situation présente. L’hypnose, en s’intéressant à ce processus, est donc tournée vers la personne et non vers un corps à réparer. Toute la place est laissée au subjectif. Les protocoles décrits dans ce dossier montrent bien que l’on tient compte du subjectif et de l’expérience des patients. Le général cède le terrain au particulier. Le thérapeute s’intéresse à son patient en tant que personne originale et non pas en tant que bloc de chair qu’il faudrait piquer, droguer ou découper.

Cet abord par l’hypnose, dans le cas de douleurs par exemple, est tellement attendu par les patients installés dans leurs souffrances, que l’hypnose n’apparaît plus comme une thérapie complémentaire mais comme la thérapie pertinente qui répond précisément à la souffrance ressentie par le patient.

Ce travail d’évaluation arrive à un moment où les demandes de formation à l’hypnose médicale affluent dans les Universités. Les soignants découvrent l’hypnose thérapeutique et ses effets parfois spectaculaires pour calmer une douleur ou une phobie invalidante. Au point que l’on se demande pourquoi l’hypnose avait disparu de l’art de soigner ? Ce dossier très complet va permettre de mieux connaître les bonnes indications de l’hypnose et certainement aider à réintroduire l’hypnose dans la recherche et dans la pratique médicale.

 

[1] Juliette Gueguen, Caroline Barry, Christine Hassler, Bruno Falissard, 2015.